jueves, septiembre 17, 2009

Quand religion rime avec ballon rond


En Europe, le début des championnats de football a coïncidé avec le mois de ramadan. Jusqu'à présent, la question du jeûne, pour les centaines de musulmans qui jouent dans les équipes européennes, n'avait pas fait débat. L'intérêt croissant pour l'islam l'a propulsée sur le devant de la scène et a donné lieu à des polémiques auxquelles plus personne n'échappe. Il ne s'agit pas toujours d'une redécouverte des traditions musulmanes. Parfois, aussi, certains joueurs souhaitent se distinguer grâce à leur identité religieuse. Dans la plupart des cas, rien ne permet de deviner quelle est la religion de joueurs comme Eric Abidal ou Seydou Keita, qui évoluent à Barcelone.

En Italie, l'entraîneur de l'Inter de Milan, José Morinho, réputé pour son caractère querelleur, a failli tomber dans le piège du racisme antimusulman. Il avait sorti le milieu de terrain Sulley Muntari au cours d'un match, estimant que sa mauvaise prestation était due au jeûne. Les réactions sur les forums Internet ne se sont pas fait attendre. Elles illustrent l'hypersensibilité des communautés musulmanes d'Europe. En Egypte, où le foot et la foi s'entremêlent comme nulle part ailleurs et où le pieux Mohamed Abou Tarika est tellement populaire que la presse en parle comme d'un véritable phénomène populaire, les gros titres sur le sujet sont devenus un moyen commode de soulever les foules. Le président de la Fédération égyptienne, Samir Zaher, a récemment déclaré qu'il fallait manger avant le match décisif contre le Rwanda [remporté 1 à 0 par l'Egypte], s'appuyant sur une fatwa d'Al-Azhar autorisant toute personne en déplacement ou contrainte à un travail fatiguant à interrompre le jeûne. Cette déclaration de l'homme fort du foot égyptien a écorné l'image de la sélection nationale, souvent présentée comme une équipe de "prosternés".

Plus généralement, les commentaires postés sur les forums arabes consacrés au football révèlent un désir obsessionnel de classer les joueurs selon des critères religieux. Alors que le football est le sport par excellence dont la philosophie repose sur des phénomènes postreligieux, tels que l'Etat-nation moderne et les drapeaux et slogans partisans, la séparation entre le supporteur et le sectaire religieux est de plus en plus incertaine. Ainsi, la rencontre entre Manchester United et Barcelone lors de la finale de la Ligue des champions en mai 2009 a donné lieu à des commentaires d'internautes qui ne comparaient pas les deux équipes, mais les attitudes musulmanes de tel ou tel joueur. Certains deviennent supporters d'une équipe pour la simple raison que l'un de ses membres porte un nom à consonance vaguement musulmane.

Le cas de l'Egyptien Mohamed Zidan, qui joue au Borussia Dortmund, a récemment fourni une autre illustration de cette confusion. Il a déclenché l'ire des internautes en déclarant, dans le tabloïd allemand Bild, qu'il était heureux de pouvoir à nouveau se concentrer entièrement sur le sport puisqu'il avait réussi à se rabibocher avec sa copine danoise Stina, précisant qu'il allait vivre avec elle. Outré, un internaute musulman s'est adressé à lui en ces termes : "Honte à toi ! Tu es musulman et arabe. Regarde Frédéric Kanouté, Seydou Keita, Sulley Muntari, Mahamadou Diarra... Ils sont Africains, mais ils sont musulmans. Ils font quoi pendant le ramadan ? Je vais juste te rappeler que Kanouté donne une grosse partie de son salaire pour la construction de mosquées en Espagne. Et toi ? Tu t'installes avec une femme en dehors du mariage !" Un autre internaute a écrit, sous le pseudonyme Death lover : "Mon frère, ton nom est Mohamed. Et pourtant, tu vis avec une Danoise, mais on n'a rien dit. C'est une mécréante, soit. Elle ne voile pas ses cheveux, mais on a fermé les yeux là-dessus. Mais qu'est-ce que ça veut dire de prendre un appartement pour s'installer avec elle ? Tu mérites la colère de Dieu et des hommes."

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