Mamoun Al-Fandy
Quand le président américain invite à des négociations de paix entre Israéliens et Palestiniens sous l'égide de Washington, c'est une bonne chose et ça mérite qu'on s'y intéresse. L'ouverture de telles négociations sur le sol américain, assorties d'une date butoir pour arriver à un accord d'ici au plus tard un an, signifie que Barack Obama pense pouvoir obtenir un succès qui lui permettra d'aborder la prochaine élection présidentielle avec sérénité. Car c'est dans un an exactement que la campagne électorale commencera aux Etats-Unis. S'il fait ce pari, cela veut dire qu'il faut prendre la chose au sérieux. Davantage en tout cas qu'au moment de la conférence d'Annapolis [novembre 2007], dans le Maryland, qui avait été organisée sous l'administration de George W. Bush. Ainsi, plusieurs éléments incitent à l'optimisme.
Premièrement, les Américains doivent être convaincus, ne serait-ce qu'à 70 %, que les négociations aboutiront vraiment à une solution d'ici un an.
Deuxièmement, les navettes de George Mitchell [l'envoyé spécial de la Maison-Blanche pour le Proche-Orient] et les négociations indirectes ont dû aboutir à des résultats suffisamment convaincants pour que l'administration Obama pense qu'il est possible de réaliser un succès historique qui contribuera à sa réélection.
Troisièmement, Obama a une idée de ce qui pourrait être un règlement définitif et qui pourrait convenir à toutes les parties du conflit. Les entretiens qu'il a eus avec Mahmoud Abbas, Benyamin Nétanyahou et certains dirigeants arabes lui ont peut-être permis de parvenir à la moyenne arithmétique des positions propalestiniennes d'un côté, israéliennes de l'autre.
Quatrièmement, il existe un accord entre Israël et les Etats-Unis sur un ensemble d'intérêts communs dans la région, notamment la stabilité du Golfe pourvoyeur de pétrole, la nécessité d'empêcher l'Iran de se doter de l'arme nucléaire et finalement l'idée de "la paix contre des marchés", c'est-à-dire l'ouverture officielle du marché des pays du Golfe aux produits israéliens en contrepartie de la paix.
Cinquièmement, on fait appel à l'Egyptien Hosni Moubarak et au Jordanien Abdallah II afin de se prémunir contre la répétition de l'échec de 1998, quand Bill Clinton avait obtenu un accord de la part de Yasser Arafat mais que celui-ci s'était laissé convaincre ensuite par un certain nombre de dirigeants arabes qu'il serait incapable de l''imposer sur le terrain et qu'il serait préférable de déclencher une nouvelle Intifada. Les Américains ont bien retenu la leçon et insistent aujourd'hui sur la nécessité de voir les pays arabes s'engager en tant que garants d'un règlement à venir. Ainsi, Israéliens et Palestiniens semblent d'accord pour dire que les Américains cautionneraient la signature israélienne, tandis que l'Egypte et la Jordanie agiraient de même pour celle des Palestiniens.
Finalement, Israël sait qu'il est dans son intérêt de parvenir à un règlement avant que le monde entier, y compris l'Union européenne et la Russie, reconnaisse l'Etat palestinien à l'ONU.
Il n'en reste pas moins que toutes les expériences du passé n'ont rien apporté de concret qui permette aux dirigeants arabes, et notamment palestiniens, de vendre l'idée d'un compromis à leurs populations. C'est en 1988 qu'Arafat avait annoncé la "paix des braves", et cela fait donc plus de vingt ans que les Arabes assistent à différentes négociations qui n'aboutissent à rien et qui sont plus lassantes qu'un mauvais feuilleton mexicain sur une chaîne satellitaire de seconde zone. Pour parvenir à un accord, il faudrait que les Palestiniens soient assistés d'une véritable puissance qui couvrirait leurs arrières. En lieu de quoi, les pays arabes, petits et grands, se livrent à une compétition pour jouer chacun sa propre partie, les uns soutenant le Fatah, les autres le Hamas, affaiblissant d'autant la position de Mahmoud Abbas.
Le problème n'est pas tant que les Palestiniens sont divisés, mais que le monde arabe est divisé. Si Israël et les Etats-Unis étaient certains que tous les Arabes soutiennent Mahmoud Abbas et sanctionnent un éventuel échec des négociations, les Palestiniens seraient en position de force. Malheureusement, Israël entretient aujourd'hui des relations avec un grand nombre de pays arabes, soit en vertu d'accords de paix en bonne et due forme, soit par des "dessous de la table". Ainsi, jusqu'à présent, le monde ne nous prend pas au sérieux. Et les Palestiniens seront contraints de négocier en position de faiblesse. Même si, en fin de compte, cela devait aboutir à une solution acceptable, il se trouvera toujours quelqu'un pour dire qu'il ne faut pas l'accepter.
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