martes, noviembre 30, 2010

28 novembre 2010 : un jour historique

Massimo Razzi

Si les documents de WikiLeaks ont plongé dans le désarroi les chancelleries de nombreux pays, ils ont également marqué un tournant historique pour l’information. Le 28 novembre 2010 restera comme le jour où tout ou presque s'est déplacé, dévidé et s'est répandu sur Internet, ou au moins à partir d’Internet.

Pensez donc, aucun journal ne s’est posé la sempiternelle question : "devons-nous d'abord publier ces documents sur papier ou sur Internet ?" Tous, du Spiegel au New York Times en passant par El País, The Guardian et Le Monde, ont commencé par diffuser les informations sur leur site. Ils poursuivront avec la version papier et continueront en utilisant les deux moyens comme un tout : un médium unique installé sur des plateformes différentes, fait d’approfondissement, de synthèse et traversé par une série de questions à la fois qualitatives et quantitatives, qui peuvent nous amener à dire que quelque chose de profondément novateur vient se produire.


Les documents de WikiLeaks partent d’Internet et sont naturellement destinés à circuler, à se propager, à être lus, commentés, enrichis et approfondis par le monde des internautes, qui correspond désormais au monde réel. Il y a pour commencer un enjeu simplement quantitatif : la force des révélations de WikiLeaks repose sur l’énorme somme de documents qui peuvent être mis à disposition du public en temps réel. Les citoyens du monde entier, à condition de disposer d’un "périphérique" informatique, peuvent tranquillement se faire leur propre idée en lisant les centaines de milliers de pages jusqu’alors inaccessibles. "Inaccessibles" car jalousement (et mal) protégées, et parce que, avant Internet, presque personne au monde n’auraient été en mesure de "gérer" logistiquement tous ces dossiers même en les ayant à portée de main. 



S’il est vrai que les "documents" servent en premier lieu à mettre le "roi" à nu, l’opération a également comme résultat (escompté ou non) de transformer en profondeur les canaux d’information et leurs poids respectifs. Via Internet, les dossiers sont entre les mains de tous. Ils étendent la médiation journalistique à des masses énormes, car n’importe qui pourra éplucher, constater, démasquer, vérifier, mettre en doute et démonter des certitudes. Ensemble, les citoyens internautes pourront même augmenter la masse de ces documents, en guider l’efficacité, faire émerger telle ou telle question internationale, nationale, ou locale. Dans le même temps, les professionnels de l’information auront le devoir de "confectionner" au mieux ces révélations, de les rendre les plus lisibles possible et par dessus tout, par un travail de grande qualité, de fouiller dans les archives et les mémoires pour relier et expliquer les faits et les méfaits que ces dossiers renferment certainement.

Les éléments qui rendent cette date du 28 novembre 2010 "historique" sont donc multiples : 1) c’est le jour où l’information est devenue l'apanage d'Internet. 2) C’est le jour où les citoyens, pour la première fois, ont eu à disposition ce genre de secrets que seule l’Histoire distillait jusqu'alors, à la façon et à l’heure choisies par le pouvoir. 3) C’est le jour où ces mêmes citoyens ont eu pour la première fois la possibilité de disséquer de nombreux faits récents et de confondre les mensonges de leurs "puissants" respectifs. 4) Mais c’est aussi le jour où l’information professionnelle s’est retrouvée face à un énorme défi, avec la possibilité d’en sortir vainqueur.

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http://www.courrierinternational.com

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