martes, noviembre 04, 2008

PALESTINE - Choisir une nouvelle stratégie

Je dois dire que je n'ai pas été surpris par les propos du Premier ministre sortant Ehoud Olmert concernant le conflit israélo-palestinien*. Un ami israélien m'avait déjà fait part du revirement spectaculaire effectué par Ehoud Olmert au cours des dernières années, et tout particulièrement l'année dernière. Ces déclarations peuvent être envisagées comme une justification de l'engagement du [président de l'Autorité palestinienne] Mahmoud Abbas. Mais vont-elles se traduire en actes ou s'agit-il seulement de paroles courageuses prononcées quand il n'y a plus d'enjeu politique ? Les propos d'Olmert font penser aux déclarations faites par certains présidents américains après la fin de leur mandat, c'est-à-dire à un moment où ils ne subissaient plus les pressions du lobby pro-israélien.

Evidemment, pour les Palestiniens, le problème est bien plus compliqué. Les décennies de lutte et de combat n'ont pas produit les effets escomptés. Sur le terrain, depuis 1948, les Palestiniens voient le contrôle de leurs terres et de leur avenir leur échapper de plus en plus. Leurs efforts en faveur de la liberté ont pris toutes les formes possibles. De l'engagement au conflit armé à l'intervention de la diplomatie et de la négociation, pour finir par deux intifadas [1987-1993 et la seconde commencée en 2000] plus ou moins violentes.

Les Palestiniens commencent également à s'interroger sur la forme que doit prendre l'Etat dans lequel ils veulent vivre. Aux débuts de l'OLP dans les années 1960, la charte palestinienne spécifiait que les habitants de la région devaient disposer d'un Etat démocratique et laïc. Mais en 1988, quand Yasser Arafat a proclamé la création d'un Etat palestinien en Palestine, le nationalisme palestinien a commencé à préconiser une solution prévoyant la coexistence de deux Etats [l'israélien et le palestinien]. Mais le redoublement de la colonisation juive dans les Territoires [de Cisjordanie] a rapidement rendu ce concept caduc.

Les Palestiniens vont certainement devoir choisir dans les prochains mois une nouvelle stratégie pour l'avenir. Le Hamas islamique a déclaré que le 9 janvier 2009 serait le dernier jour du mandat du président Mahmoud Abbas. Selon la Constitution palestinienne intérimaire, quand le mandat d'un président prend fin – ou quand il disparaît (comme ce fut le cas pour Arafat) –, c'est le président du Parlement qui dirige le pays pendant les soixante jours nécessaires à l'organisation des élections présidentielles. Or ce président, Aziz Dweik, est détenu par les Israéliens depuis la capture du soldat israélien Gilad Shalit.

La date de la fin du mandat d'Abbas ne fait pas non plus l'unanimité. Son mandat prendra-t-il fin le 9 janvier prochain ou un an plus tard, quand le Parlement actuel arrivera à son terme ? Jusque-là tout peut arriver, mais à moins de parvenir à un accord pour des élections anticipées, présidentielle et parlementaires, une solution est difficilement envisageable.

Les élections anticipées ne pourront pas avoir lieu sans l'accord du Hamas. Or comme les sondages ne lui sont guère favorables – que ce soit pour obtenir de nouveau une majorité au Parlement ou la présidence –, il y a peu de chances qu'il accepte des élections anticipées.

Pour nombre de Palestiniens, toute cette agitation concernant les élections, la présidence et le Parlement n'a aucun sens tant que le siège de Gaza, l'occupation de la Cisjordanie et les colonies juives illégales sur les terres palestiniennes se poursuivent. Un rapport du Palestine Strategy Study Group [un groupe d'intellectuels et hommes politiques palestiniens] appelle à un changement radical de discours. Selon cette étude, les expressions "processus de paix" et "construction d'un Etat" ne désignent plus que la poursuite du statu quo, où les Palestiniens doivent se contenter de réagir plutôt que d'agir. Selon eux, il faut parler de "résistance intelligente" et de "droit des peuples à disposer d'eux-mêmes". Selon eux, les Palestiniens devraient avoir recours à la stratégie de la décolonisation plutôt que de perdre du temps et de l'énergie en d'inutiles discours sur le processus de paix.

Naturellement, ce groupe appelle à l'unité nationale, qui est pour eux l'un des points stratégiques les plus importants. Leur appel ne se limite pas à Gaza et à la Cisjordanie mais à tous les Palestiniens [y compris ceux d'Israël], qui doivent tendre vers un seul but : une stratégie commune. Selon le Palestine Strategy Group, les Palestiniens doivent signifier clairement aux Israéliens qu'ils ne veulent plus de cette solution à deux Etats.
Pour eux, si besoin était, il faudrait même dissoudre l'Autorité palestinienne et laisser l'autorité légale, morale et financière aux mains des Israéliens. Leur argument se résume ainsi : utiliser des outils stratégiques afin de rendre plus difficiles les choix des Israéliens. Leurs idées n'ont pas encore fédéré les Palestiniens, et il faudra du temps avant qu'elles ne touchent la majorité. Mais ce document de quatre-vingts pages a au moins le mérite de montrer la voie aux Palestiniens afin de les aider à ne plus subir cette situation mais à être enfin les acteurs de leur destin.

* Avant de quitter son poste de Premier ministre, Olmert a déclaré : "Nous devons concrètement nous retirer de presque tous les territoires [palestiniens] si ce n'est de tous. Cela comprend aussi Jérusalem [-Est]."

Daoud Kuttab
Amin
www.courrierinternational.com

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